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L’affaire Backyard – Mises en cause uniquement en vue d’obtenir une contribution et une indemnisation en vertu de la Loi sur la construction de l’Ontario

La récente décision de la Cour supérieure de justice de l’Ontario, Backyard XP Inc. v. Cesario-Valela, 2023 ONSC 6312 (« Backyard ») précise que la Loi sur la construction[1] (la « Loi ») ne permet pas à une non-partie d’être ajoutée par voie de demande reconventionnelle ou de mise en cause sauf s’il s’agit d’une véritable demande de contribution ou d’indemnisation au sens de l’article 4 du règlement procédural de la Loi.[2]

Contexte

Les défendeurs et propriétaires requérants, Mirella Cesario-Valela et Vito Valela (les « propriétaires »), demandaient l’autorisation de mettre en cause Garrison Creek Construction Inc. (« Garrison »). Les propriétaires alléguaient que Garrison était un alter ego de l’entrepreneur demandeur, BackyardXP Inc. (« Backyard »). Les propriétaires souhaitaient faire valoir des réclamations contre Garrison en raison du fait que Garrison et Backyard étaient des sociétés liées.

Décision

La Cour a conclu que, malgré l’efficacité judiciaire de l’approche des propriétaires dans l’introduction simultanée de demandes contre Backyard et Garrison, il n’était pas possible, sur le plan procédural, d’intenter une action contre Garrison en vertu de la Loi.[3]

Pour arriver à cette décision, la Cour a examiné l’article 4 de la Loi et identifié trois exigences pour les demandes d’autorisation de mise en cause en vertu de la Loi :

  1. La motion doit être signifiée au propriétaire et à toutes les personnes;
  2. La mise en cause projetée doit être en vue d’obtenir une contribution ou une indemnisation et non être une demande voilée de dommages-intérêts;
  3. Le tribunal doit être convaincu que l’instruction de la mise en cause projetée : i) ne portera pas indûment atteinte au mis en cause ou à tout créancier privilégié ou défendeur, ou ii) n’aura pas pour effet de retarder ou de compliquer indûment le règlement de l’action[4].

La décision a porté sur la deuxième exigence. Avant l’audience, les propriétaires ont refusé toutes les questions au cours du contre-interrogatoire au sujet de la nature de la demande qu’ils entendaient présenter contre Garrison et n’ont pas déposé de projet de mise en cause dans le cadre des documents déposés avec la motion. Au cours de l’audience de la motion, les propriétaires ont concédé que l’objet de la mise en cause projetée était de faire valoir des demandes contre Garrison en tant que partie visée. La Cour a conclu que la demande des propriétaires contre Garrison constituait en fait une demande de dommages-intérêts[5].

La Cour a établi une distinction entre cette affaire et Art Nouveau Inc. v. Razumenko, 2011 ONSC 420 (« Art Nouveau »), dans laquelle une mise en cause avait été accordée contre deux personnes que les défendeurs alléguaient être les véritables parties contractantes.

Dans Art nouveau, la mise en cause avait été accordée nunc pro tunc alors que la mise en cause avait déjà été émise au moment de la présentation de la motion, la restriction prévue par la loi concernant la contribution ou l’indemnisation n’avait pas été soulevée ni discutée, les défenderesses niaient un contrat avec le demandeur et alléguaient que le contrat était avec les tiers. Comme aucun de ces faits dans Art Nouveau n’était présent dans l’affaire Backyard, la Cour a conclu que les exigences expresses pour les mises en cause prévues à l’article 4 du règlement procédural de la Loi, Règl de l’Ont 302/18, s’appliquaient.[6]

En outre, la Cour a conclu que des parties ne pouvaient être ajoutées à une action en privilège par voie de demande reconventionnelle en vertu de l’art. 2(1)(a) du Règl de l’Ont 302/18, qui stipule qu’un défendeur peut uniquement se porter demandeur reconventionnel « et faire contre le demandeur qui l’a introduit à titre de défendeur, la réclamation qu’il a le droit de faire contre ce dernier, que la réclamation soit reliée ou non à la réalisation des améliorations » (soulignement ajouté par la Cour)[7]. Cela signifie que, même si les propriétaires peuvent faire une demande reconventionnelle à l’encontre de Backyard, ils n’ont pas le droit de faire une demande reconventionnelle à l’encontre d’autres parties, y compris Garrison.

Fait important, la Cour a également conclu qu’elle n’avait pas le pouvoir discrétionnaire d’autoriser une mise en cause en dehors de ce qui est prévu dans le règlement procédural de la Loi à l’article 4 (pour contribution ou indemnisation) ou à l’article 2 (une demande reconventionnelle contre la personne qui a introduit le défendeur à titre de défendeur)[8].

Éléments clés à retenir

Les mises en cause qui ne visent pas à obtenir une contribution ou une indemnisation et les demandes reconventionnelles contre des non-parties ne peuvent pas être intentées dans le cadre d’actions en vertu de la Loi sur la construction – elles doivent être faites dans le cadre d’actions ordinaires distinctes.

 

[1] LRO 1990, c C.30.

[2] Règl. de l’Ont 302/18.

[3] Backyard XP Inc. c. Cesario-Valela, 2023 ONSC 6312 par. 3.

[4] Backyard XP Inc. c. Cesario-Valela, 2023 ONSC 6312 au par. 5.

[5] Backyard XP Inc. c. Cesario-Valela, 2023 ONSC 6312 au par. 15.

[6] Backyard XP Inc. c. Cesario-Valela, 2023 ONSC 6312 aux par. 9-13.

[7] Backyard XP Inc. c. Cesario-Valela, 2023 ONSC 6312 au par. 16.

[8] Règl. De l’Ont 302/18, art. 2 et 4; Backyard XP Inc. c. Cesario-Valela, 2023 ONSC 6312 au par. 17.

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