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Le gouvernement du Canada lance des consultations sur les règles de divulgation obligatoire des paiements

Le gouvernement du Canada a annoncé avoir entamé avec l’industrie des consultations concernant un plan d’établissement de nouvelles normes de divulgation obligatoire des paiements effectués aux gouvernements par des sociétés actives dans le secteur extractif, y compris les secteurs minier, pétrolier et gazier. Ces nouvelles normes reflètent l’importance qu’accorde le gouvernement actuel à la lutte contre la corruption et les paiements illicites à des agents publics, tant au pays qu’à l’étranger.

L’intention du Canada de mettre en œuvre un régime de divulgation des paiements aux gouvernements a initialement été annoncée par le Premier ministre du Canada Stephen Harper le 12 juin 2013 – voir Le Canada annonce une nouvelle initiative de divulgation des paiements aux gouvernements. Plus récemment, un groupe de travail conjoint composé de représentants de l’industrie et des ONG, soit le Groupe de travail sur la transparence dans les industries extractives, a formulé des recommandations sur la teneur d’un régime de divulgation des paiements pour l’industrie minière – voir Recommendations Issued for Canada’s Mandatory Payment Disclosure Regime (disponible en anglais seulement). Le gouvernement a souligné que ces nouvelles normes visaient à améliorer la transparence au sein de l’industrie et à harmoniser les règles canadiennes avec la Directive sur la transparence de l’UE et la Dodd-Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act des États-Unis.

Les consultations visent à ajouter aux discussions qui ont eu lieu au cours de la dernière année entre les gouvernements et diverses parties intéressées. La période de commentaires s’étendra jusqu’au 9 mai 2014. Jusqu’à cette date, les sociétés peuvent présenter leurs propres commentaires publics au portail Gouvernement ouvert du Secrétariat du Conseil du Trésor. Le gouvernement est aussi prêt à rencontrer directement les parties prenantes pour discuter de toute préoccupation de leur part. Il s’agit d’une phase importante pour l’industrie car il s’agit de la meilleure occasion pour les sociétés d’avoir un effet sur l’élaboration des normes avant leur adoption.

Principes fondamentaux du régime de divulgation

Le gouvernement a énoncé dans les documents de consultation les principes suivants comme fondement des nouvelles normes :

  1. Sociétés ouvertes – Le régime s’appliquera à toutes les sociétés inscrites à la cote d’une bourse qui exercent des activités ou ont leur siège social au Canada et qui participent au développement commercial du pétrole, du gaz naturel et du minerai, lesquelles seront tenues de déposer des déclarations.
  2. Sociétés fermées – En outre, les sociétés fermées du domaine de l’extraction seront tenues de faire une déclaration si elles rencontrent deux des trois critères suivants : 20 millions de dollars canadiens d’actifs; 40 millions de dollars canadiens de chiffre d’affaires net; 250 employés; ces critères ont été adoptés aux fins d’uniformité avec les critères édictés par l’UE et les États-Unis.
  3. Équivalence – Il devrait y avoir une reconnaissance et une acceptation explicites des régimes de déclaration équivalents de sorte qu’une déclaration déposée en vertu des autres régimes soit acceptée au Canada; les autres régimes sont notamment ceux qui ont été adoptés aux États-Unis et dans l’UE.
  4. Portée – Toutes les sociétés minières qui sont des émetteurs assujettis en vertu de la législation canadienne portant sur les valeurs mobilières devraient déclarer les paiements relatifs au développement commercial de gisements de minéraux faits à tout ordre de gouvernement au Canada ou à l’étranger.
  5. Filiales et entités contrôlées – Les paiements effectués par les filiales des sociétés visées, par des entités directement ou indirectement contrôlées et par des entités sur lesquelles elles exercent un contrôle conjoint ou une influence importante devraient également être divulgués.
  6. Paiements visés – Une divulgation sur une base désagrégée et selon la comptabilité de caisse devrait être requise pour les impôts sur les bénéfices, les redevances, les droits, les droits de production, les primes, les dividendes, les paiements relatifs aux infrastructures prescrits par une loi ou un contrat et les frais de transport et d’exploitation des terminaux.
  7. Paiements exemptés – Comme ce que prévoit la législation américaine et européenne, les sociétés ne seraient pas tenues de divulguer les paiements sociaux (p. ex. écoles, formation, centres communautaires locaux).
  8. Seuil de déclaration des paiements – Il y aura un seuil de déclaration des paiements à tous les ordres de gouvernement, fixé à 100 000 $, comparable aux régimes américain et européen; cela s’applique à toutes les sociétés visées par les nouvelles normes.
  9. Désagrégation par projet – Les paiements devraient être divulgués projet par projet, et la définition de « projet » devrait généralement, mais non pas exclusivement, être déterminée en fonction d’accords juridiques tels les licences ou les concessions, comme selon les approches des É.-U. et de l’UE.
  10. Formulaire et format de divulgation – Le gouvernement est en voie d’élaborer un modèle de déclaration qui se rapprochera essentiellement de celui des É.-U. et de l’UE; les sociétés seraient tenues d’afficher leur déclaration annuellement sur leur site Web en « eXtensible Business Reporting Language » (XBRL), de sorte que les renseignements seraient gratuits et pourraient être utilisés par le public sans restriction.
  11. Vérification, audit et sanction – Les sociétés seraient tenues de mandater un tiers pour vérifier les renseignements qu’elles fournissent; le gouvernement vérifiera périodiquement certaines sociétés annuellement au moyen d’un mécanisme de conformité, comme les sanctions administratives pécuniaires, en cas d’absence de divulgation ou de divulgation qui présente de façon inexacte les données.

Questions à examiner par l’industrie

Le gouvernement est particulièrement intéressé à recevoir des commentaires de l’industrie pétrolière et gazière sur les questions suivantes :

  1. De quels éléments le gouvernement du Canada devrait-il tenir compte pour communiquer la teneur de cette initiative aux intervenants et au public?
  2. Quelles sont les conséquences de l’application de critères équivalents à la Directive sur la transparence de l’UE?
  3. Présentement, les paiements versés aux entités autochtones seront visés par les nouvelles normes, mais de quelle façon les paiements versés à des entités autochtones étrangères devraient-ils être visés?
  4. Quels éléments devraient être inclus dans le modèle de déclaration commun?
  5. Quelles mesures doivent être apportées afin de s’assurer qu’il n’y a pas de double comptabilisation?
  6. Comment peut-on rendre le plus facilement accessible par le public les renseignements tirés des déclarations des sociétés?
  7. Quelle serait la solution la plus simple afin que les entreprises puissent informer le gouvernement et le public qu’elles ont rempli leurs obligations de déclaration?
  8. La vérification des données de déclaration par une tierce partie est-elle viable?
  9. Quelles sont les répercussions pour l’industrie qui se rattachent à l’imposition de sanctions en cas de non-respect de l’obligation de déclaration ou de présentation d’une déclaration volontairement inexacte?
  10. Comment l’industrie propose-t-elle de régler le conflit entre les clauses de confidentialité des ententes sur les répercussions et les avantages, d’une part, et les exigences de déclaration, d’autre part?

Mise en œuvre du nouveau régime de déclaration

Le gouvernement est actuellement en pourparlers avec les provinces pour déterminer si ces mesures peuvent être adoptées au niveau provincial plutôt qu’au niveau fédéral. Le gouvernement a manifesté son désir que ces normes soient appliquées par les organismes provinciaux de réglementation des valeurs mobilières. Il a cependant indiqué que si ces normes ne sont pas mises en œuvre par les provinces sous peu, le gouvernement entreprendra le processus législatif nécessaire à l’été 2014. Le gouvernement introduirait les nouvelles normes dans le cadre de son programme législatif en septembre 2014 en vue d’adopter la loi au plus tard le 1er avril 2015.

Cette initiative de mise en œuvre de la déclaration obligatoire des paiements aux gouvernements ne constitue qu’un des nombreux éléments nouveaux importants en droit canadien de la lutte contre la corruption. Avec la modification apportée l’année dernière à la Loi sur la corruption d’agents publics étrangers, les récentes mesures d’application de la part de la Gendarmerie royale et les déclarations de culpabilité obtenues en vertu de la LCAPE, ces derniers événements font ressortir la nécessité pour les sociétés canadiennes œuvrant dans le secteur extractif de s’assurer d’avoir en place des stratégies de conformité efficaces et d’agir rapidement lorsque des contraventions potentielles sont détectées. Le groupe du droit du commerce international et de l’investissement de McCarthy Tétrault jouit d’une vaste expérience en matière de conformité et d’application de la loi dans le domaine et est prêt à aider les sociétés touchées par cette évolution récente.

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