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L’affaire McCracken v. Canadian National Railway Co. : Un signe des temps à venir dans les recours collectifs portant sur le paiement des heures supplémentaires?

Même si l’expérience canadienne est relativement récente en matière de recours collectifs portant sur le paiement des heures supplémentaires, des développements assez importants sont survenus. Un de ces faits nouveaux s’est présenté dans le cadre du recours collectif McCracken v. Canadian National Railway Co. (disponible en anglais seulement) relatif à un « classement inapproprié ». Une question persiste dans le contexte des recours collectifs portant sur le paiement du temps supplémentaire : les dispositions du Code du travail du Canada (le « Code ») peuvent-elles être considérées comme des modalités implicites des contrats de travail et, si c’est le cas, peuvent-elles servir de fondement à une poursuite directe pour violation de contrat? L’affaire McCracken a répondu à cette question dans l’affirmative.

Dans la récente décision rendue par le juge Perell de la Cour supérieure de justice de l’Ontario, la certification du recours collectif contre la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (le « CN ») a été accordée en dépit de certaines considérations initiales portant sur les questions communes. L’instance, introduite par le représentant des demandeurs proposé Michael Ian McCracken, vise un montant total de 300 millions de dollars en dommages-intérêts. Le représentant allègue que le CN a intentionnellement catégorisé tous ses « superviseurs de premier niveau » comme des « directeurs » afin de ne pas avoir à rémunérer leurs heures supplémentaires et congés payables en vertu du Code.

La décision indique comment les questions communes seront abordées dans les cas de « classement inapproprié », mais la conclusion suivante du juge Perell est plus importante :

« [traduction] […] Une conclusion selon laquelle les tribunaux ont compétence pour faire appliquer le droit prévu par la loi [il s’agit du Code] a pour effet que le droit constitue une condition implicite du contrat de travail par effet de la loi. Autrement dit, en matière de droit, les dispositions prévues par la loi deviennent des stipulations contractuelles. »

Le juge Perell a précisé que sa conclusion ne signifiait pas simplement qu’il était possible qu’une cause d’action pour violation de contrat implicite existait, mais que le représentant des demandeurs avait réellement une cause d’action pour violation d’une condition implicite prévue par la loi.

Il n’est pas certain que cette décision tranche la question de savoir si une poursuite civile peut être introduite directement en vertu des dispositions du Code. Avant l’affaire McCracken, un autre recours collectif portant sur le temps supplémentaire, Fulawka v. The Bank of Nova Scotia, a porté sur la même question et a donné lieu à une conclusion opposée. D’ici quelques mois, l’affaire Fulawka sera de nouveau entendue. Dans l’affaire Fulawka, le juge Strathy a décidé que le Code ne pouvait pas être utilisé pour l’introduction d’une poursuite civile. Cependant, le juge Strathy l’a appliqué indirectement en concluant qu’il pourrait influencer les obligations contractuelles existantes. Par comparaison, la décision du juge Perell, analyse expressément celle rendue par le juge Strathy, a exposé des motifs détaillés pour lesquels une poursuite civile directe pourrait être fondée sur le Code. En fait, le juge Perell a fait remarquer que sa méthodologie aurait permis au juge Strathy de faire directement ce qui a été fait indirectement. La manière dont la Cour divisionnaire tranchera cette question en appel reste à voir. Cependant, il y a des considérations évidentes qui rendent la décision du juge Perell attirante. Par exemple, le juge Perell a entrepris une analyse exhaustive du Code et de plusieurs de ses dispositions, une démarche qui était absente dans la décision Fulawka.

On peut vraisemblablement supposer que l’affaire McCracken, à l’instar des autres recours collectifs importants portant sur le paiement des heures supplémentaires, sera portée en appel. D’ici là, elle pourrait délimiter les bases sur lesquelles les recours collectifs seront intentés contre des employeurs assujettis à la réglementation fédérale.

Remarques de McCarthy Tétrault

Cette conclusion est importante pour les employeurs et les défendeurs dans le cadre des recours collectifs en général. Si l’analyse McCracken est confirmée en appel, on ne pourra pratiquement plus douter que le Code peut être utilisé comme moyen permettant d’introduire directement une poursuite civile. Par conséquent, les employeurs devraient être attentifs à leur définition des termes « directeurs » ou « superviseurs » et veiller à ce qu’elles soient conformes aux dispositions du Code, car elles seront considérées comme des stipulations contractuelles de la relation d’emploi.

Les auteurs souhaitent remercier Kosta Kalogiros pour le travail important qu’il a accompli dans le cadre du présent article.

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Sean S. Smyth

Dana M. Peebles