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Délai de congé fourni par l’employé et obligations de l’employeur : la Cour suprême se prononce

Le 25 juillet dernier, la Cour suprême du Canada renversait la décision de la Cour d’appel du Québec dans le dossier Asphalte Desjardins Inc. et la Commission des normes du travail (Commission). Dans cette affaire, le salarié en cause travaille pour son employeur depuis 1994. Le vendredi 15 février 2008, il remet à son employeur un avis de démission annonçant qu’il compte mettre fin à son contrat de travail le 7 mars 2008, soit trois semaines plus tard. Le lundi 18 février, l’employeur décide de mettre fin au contrat de travail dès le lendemain, soit le 19 février 2008, plutôt que le 7 mars 2008.

La Commission réclame pour le compte du salarié (qui, compte tenu de ses années de service, avait droit à un préavis de 8 semaines en vertu de la Loi sur les normes du travail (L.n.t.)) une indemnité équivalant à trois semaines de préavis et correspondant au délai de congé donné par le salarié dans sa lettre de démission, ainsi que la valeur monétaire du congé annuel, dans la même proportion. La Commission a eu gain de cause en Cour du Québec, mais a été déboutée en Cour d’appel.

Ce pourvoi soulève la question de l’interaction des articles du Code civil du Québec (C.c.Q.) et de la L.n.t. eu égard à l’effet du délai de congé. La Cour suprême confirme qu’il n’y a pas de résiliation automatique du contrat de travail dès réception d’un délai de congé, au contraire, la relation contractuelle perdure jusqu’à la date prévue par le délai de congé donné par le salarié ou l’employeur. Ainsi, un employeur qui reçoit d’un salarié un délai de congé prévu à l’article 2091 C.c.Q. ne peut mettre fin unilatéralement au contrat de travail à durée indéterminée sans respecter lui-même ses obligations en matière de fin d’emploi. Si l’employeur refuse de laisser le salarié fournir sa prestation de travail pendant le délai de congé, il se trouve à mettre fin au contrat au sens de l’article 82 de la L.n.t. et il est alors redevable d’une indemnité tenant lieu de préavis.

En conclusion, une fois avisé de la date à laquelle un salarié souhaite quitter son emploi, un employeur qui s’objecte à ce que l’employé reste à l’emploi durant le délai de congé fourni, peut soit 1) à son tour donner un délai de congé ou une indemnité en tenant lieu conformément à l’article 2091 C.c.Q. et aux articles 82 et 83 de la L.n.t. ou 2) demander à l’employé de ne plus se présenter sur le lieu de travail, mais continuer à le rémunérer pour cette période. La Cour suprême distingue la situation de la présente instance avec le cas où un salarié avise son employeur qu’il entend démissionner sur-le-champ, mais offre néanmoins de rester un certain temps. Dans un tel cas, si l’employeur souhaite effectivement que le salarié quitte sur-le-champ, il y a rencontre des volontés, et le délai de congé n’est pas nécessaire puisqu’un contrat à durée indéterminée peut prendre fin de l’accord des parties.