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Financement d’entreprise, fusions et acquisitions et capital-investissement

Par Jennifer F. Longhurst et Jeremy Pleasant

Financement d’entreprise

Le Canada est doté de marchés financiers bien développés et très évolués. Les principales sources de capitaux sont les banques à charte canadiennes et les institutions financières (notamment les caisses de retraite, les sociétés de fonds communs de placement et les sociétés d’assurances), les marchés publics, le capital-investissement et les organismes gouvernementaux. Les actions des sociétés ouvertes canadiennes et étrangères peuvent être cotées et négociées à une ou à plusieurs bourses canadiennes. Les principales bourses du Canada sont la Bourse de Toronto (TSX), la plus grande bourse du pays, et la Bourse de croissance TSX (TSXV), chacune ayant ses propres conditions d’admission à la cote. Le Canada compte également des marchés hors cote actifs pour une variété d’autres titres, y compris, plus particulièrement, les titres de créance. Les banques à charte canadiennes constituent la principale source de marges de crédit et de prêts à terme renouvelables.

LA LÉGISLATION SUR LES VALEURS MOBILIÈRES AU CANADA A FAIT L’OBJET D’IMPORTANTS TRAVAUX D’HARMONISATION, GRÂCE À L’UTILISATION DE RÈGLEMENTS D’APPLICATION PANCANADIENNE OU MULTILATÉRALE ADOPTÉS PAR LES AUTORITÉS CANADIENNES EN VALEURS MOBILIÈRES (ACVM), ORGANISME-CADRE REGROUPANT TOUS LES ORGANISMES PROVINCIAUX DE RÉGLEMENTATION DES VALEURS MOBILIÈRES, ET PROMULGUÉS EN TANT QUE LOIS AU NIVEAU PROVINCIAL.

Appels publics à l’épargne et placements privés

Au Canada, les lois sur les valeurs mobilières relèvent actuellement de la compétence provinciale, et chaque province ou territoire canadien a donc son propre organisme de réglementation des valeurs mobilières et fait ses propres lois dans ce domaine. Néanmoins, la législation sur les valeurs mobilières au Canada a fait l’objet d’importants travaux d’harmonisation, grâce à l’utilisation de règlements d’application pancanadienne et multilatérale adoptés par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM), organisme-cadre regroupant tous les organismes provinciaux de réglementation des valeurs mobilières, et promulguées en lois par les provinces et territoires. De plus, l’« autorité principale » ou le « régime de passeport » adopté par toutes les provinces canadiennes (à l’exception de l’Ontario, qui est le plus gros marché financier du Canada) permet que de nombreux aspects des lois sur les valeurs mobilières soient réglementés efficacement par une seule compétence participante (c.-à-d. l’« autorité principale » dans de telles circonstances), en plus de l’Ontario. Ces aspects comprennent l’examen et le visa des prospectus, le respect des obligations d’information continue et l’obtention de dispenses de diverses dispositions des lois sur les valeurs mobilières.

Les sociétés qui offrent des titres de créance ou des titres de participation au public canadien, que ce soit dans le cadre d’un premier appel public à l’épargne (PAPE), d’un reclassement de titres ou d’une autre opération, doivent généralement préparer un prospectus qui devra être approuvé par l’organisme de réglementation des valeurs mobilières de la province ou du territoire où elles offrent leurs titres. Le prospectus sera examiné par l’organisme de réglementation principal aux termes du régime de passeport décrit ci-dessus. Un exemplaire du prospectus doit également être remis aux investisseurs potentiels et faire l’objet d’un dépôt public. Le prospectus doit contenir un exposé complet, véridique et clair de la nature des titres offerts et des activités commerciales de l’émetteur.

Si les titres sont offerts au Québec, les prospectus rédigés en anglais doivent aussi être traduits et distribués en français.

Il est possible de se soustraire à l’obligation d’établir un prospectus lorsque les titres sont offerts aux termes d’une dispense exclusivement à des investisseurs institutionnels ou à d’autres « investisseurs accrédités », bien que dans de tels cas, la pratique du marché puisse tout de même obliger l’entreprise à envoyer aux investisseurs une « notice d’offre » contenant des renseignements qui sont souvent à peu de chose près équivalents à ceux contenus dans le prospectus. Il existe de nombreuses autres dispenses de prospectus, notamment celles qui concernent l’émission de titres par des « émetteurs fermés » ou à l’intention d’employés ou, encore, celles qui concernent l’émission de papier commercial à court terme ayant reçu une note approuvée et de titres de créances bancaires, auxquels cas il n’y a généralement aucun document d’information à fournir ou un document abrégé est utilisé. Des restrictions de revente ou de période d’acclimatation s’appliquent habituellement aux titres vendus aux termes d’une dispense.

Les actionnaires de sociétés ouvertes canadiennes n’ont généralement pas de droits préférentiels de souscription prévus par la loi ou par contrat. En conséquence, les nouvelles émissions d’actions se font habituellement dans le cadre d’un appel public à l’épargne ou d’un placement privé, plutôt que par l’émission de droits de souscription aux actionnaires existants.

Les émetteurs dont les actions sont inscrites à la cote de certaines Bourses canadiennes peuvent tirer profit du régime de placement par voie de prospectus simplifié au Canada qui permet de mobiliser des capitaux sur les marchés publics de façon rapide en préparant et en déposant un prospectus simplifié qui intègre par renvoi les plus récents états financiers et autres documents d’information continue de l’émetteur. En général, les émetteurs admissibles à ce régime peuvent faire approuver leur prospectus par l’organisme de réglementation des valeurs mobilières provincial dans les quatre jours ouvrables suivant le dépôt d’un prospectus provisoire. Dans le cas des émetteurs importants, il arrive souvent qu’un syndicat de placement canadien conclue une convention de « prise ferme ». Cette convention de prise ferme constitue une convention opposable contre les preneurs fermes visant la souscription des titres offerts en vente, même avant le dépôt d’un prospectus provisoire, ce qui fait en sorte que le syndicat assume le risque de fluctuation des prix sur le marché à compter du moment de la signature de la convention de « prise ferme » avec l’émetteur, jusqu’à la clôture du placement. Dans un tel cas, un prospectus provisoire doit être déposé dans les quatre jours ouvrables suivant la signature de la convention de prise ferme et le syndicat peut commencer à solliciter les souscripteurs dès que la convention est signée et qu’un communiqué de presse est publié. Pour les émetteurs qui ne sont pas admissibles au régime de placement par voie de prospectus simplifié, le processus d’approbation du prospectus par l’organisme de réglementation des valeurs mobilières provincial peut prendre de trois à six semaines, parfois plus.

Aux termes des lois sur les valeurs mobilières canadiennes, les émetteurs peuvent aussi déposer un prospectus préalable de base pour un montant total maximum en dollars de titres (qui peut être réparti entre des titres de créance, des titres de participation et d’autres titres) qui seront par la suite émis sur une période d’au plus 25 mois. Au moment du placement réel des titres visés par le prospectus préalable de base – et au plus tard deux jours ouvrables après la fixation du prix d’offre des titres, l’émetteur dépose simplement un supplément de prospectus relativement court indiquant les modalités particulières des titres alors offerts ainsi que les renseignements supplémentaires dont ne disposait pas l’émetteur au moment du dépôt du prospectus. Bien qu’il y ait des exceptions (p. ex. lorsque des produits novateurs, structurés ou dérivés sont placés), les suppléments des prospectus préalables de base ne font pas l’objet d’un examen par les organismes de réglementation, ce qui permet aux émetteurs d’agir rapidement et de tirer avantage de créneaux de financement de durée limitée au sein des marchés.

Obligations d’information continue

L’émetteur qui dépose un prospectus, qui inscrit ses titres à la cote d’une Bourse canadienne ou qui acquiert un émetteur assujetti canadien par voie d’une quelque opération d’échange d’actions devient un « émetteur assujetti » et, à ce titre, il devient assujetti à différentes obligations d’information continue et en temps opportun aux termes des lois sur les valeurs mobilières. Ces obligations portent notamment sur la préparation et le dépôt des états financiers trimestriels et annuels et du rapport de gestion y afférent, ainsi que d’une notice annuelle et des déclarations décrivant tout changement important dans les affaires de l’émetteur. Les administrateurs, dirigeants et autres « initiés » (qui comprennent les détenteurs de plus de 10 % des droits de vote afférents aux titres avec droit de vote en circulation) de l’émetteur sont tenus de déposer des déclarations d’initié sur toute négociation des titres de l’émetteur et il leur sera interdit d’effectuer des opérations sur les titres de l’émetteur s’ils possèdent quelque information non publique importante au sujet de l’émetteur. Des circulaires d’information de la direction doivent être préparées relativement aux assemblées annuelles et extraordinaires des actionnaires, et elles doivent contenir l’information prescrite, notamment, des renseignements complets sur la rémunération des dirigeants pour ce qui est des assemblées générales annuelles ou des autres assemblées dans le cadre desquelles des administrateurs seront élus ou la rémunération des dirigeants sera mise aux voix.

Les émetteurs étrangers qui satisfont à certaines conditions et qui deviennent des émetteurs assujettis au Canada par suite de l’inscription de leurs titres à la cote d’une Bourse canadienne ou de l’acquisition d’un émetteur assujetti canadien par une opération d’échange d’actions peuvent généralement respecter leurs obligations d’information continue au Canada en déposant les documents de leur territoire d’origine.

Les ACVM ont adopté différents règlements qui s’inspirent de la loi américaine Sarbanes-Oxley. Ces règlements comprennent notamment un règlement d’application pancanadienne sur la surveillance des vérificateurs, un règlement d’application pancanadienne exigeant une attestation du chef de la direction et du chef des finances, et un règlement d’application pancanadienne sur les comités de vérification. En outre, un règlement et une politique d’application pancanadienne ont été adoptés en matière de gouvernance d’entreprise et ils prévoient généralement un régime fondé sur l’obligation de « se conformer ou s’expliquer ». La politique d’application pancanadienne définit les meilleures pratiques en matière de gouvernance d’entreprise en ce qui a trait à l’indépendance du conseil d’administration et des comités, au processus et aux politiques du conseil d’administration ainsi qu’à la diversité et au rôle de surveillance du conseil d’administration; le règlement d’application pancanadienne exige des émetteurs qu’ils divulguent, sur une base annuelle, leurs pratiques en matière de gouvernance d’entreprise.

Les organismes canadiens et américains de réglementation des valeurs mobilières ont adopté le Régime d’information multinational (RIM) qui permet d’offrir les titres de grands émetteurs américains au public canadien en utilisant une déclaration d’enregistrement américaine déposée auprès de l’organisme américain appelé Securities and Exchange Commission (SEC). Les sociétés inscrites à la cote d’une Bourse canadienne sont assujetties aux règles et aux règlements de cette Bourse.

Fusions et acquisitions

Le Canada s’est doté de lois sur les sociétés et les valeurs mobilières qui régissent l’acquisition de sociétés ouvertes canadiennes, acquisition qui peut se faire selon un processus de négociation ou de manière non sollicitée. Deux méthodes sont couramment utilisées pour acquérir une société ouverte au Canada, à savoir l’offre publique d’achat et le plan d’arrangement, bien que dans un contexte hostile, l’offre publique d’achat soit généralement la seule structure pratique permettant à un acquéreur de réaliser une acquisition sans le soutien du conseil d’administration de la société visée.

Offres publiques d’achat

Les lois provinciales et territoriales harmonisées sur les valeurs mobilières régissent les offres publiques d’achat. L’offre publique d’achat s’entend généralement d’une offre faite à une personne, dans une province ou un territoire canadien, visant l’acquisition d’un certain nombre d’actions avec droit de vote ou de titres de participation d’une même catégorie d’une société visée, laquelle offre, si elle est acceptée, fait en sorte que l’initiateur (et les personnes qui agissent de concert avec lui) détient au moins 20 % des actions en circulation de cette catégorie. Une offre publique d’achat doit offrir la même contrepartie à tous les actionnaires, et il est interdit d’accorder un « avantage accessoire » à un actionnaire particulier. L’offre doit être valide durant une période d’au moins 105 jours, sous réserve d’un abrègement à 35 jours minimum en cas d’accord de la société visée dans une opération amicale ou lorsqu’une autre offre abrégée ou une opération de privatisation a été annoncée. Une offre publique d’achat est assujettie à une condition de dépôt obligatoire selon laquelle plus de 50 % des titres en circulation de la société visée, à l’exclusion des titres dont l’initiateur et toute personne agissant de concert avec lui ont la propriété véritable ou sur lesquels ils exercent une emprise, doivent être déposés et non retirés avant que l’initiateur puisse en prendre livraison dans le cadre de l’offre publique d’achat. L’offre publique d’achat doit aussi être prolongée par l’initiateur d’au moins 10 jours supplémentaires après que l’initiateur a satisfait à la condition de dépôt minimal et que toutes les autres modalités de l’offre ont été respectées ou ont fait l’objet d’une renonciation.

L’initiateur doit fournir aux actionnaires de la société visée une note d’information relative à l’offre publique d’achat contenant les renseignements prescrits sur l’offre, y compris certains renseignements normalement présentés dans un prospectus et concernant l’initiateur (notamment des états financiers pro forma), si les actions de l’initiateur font partie de la contrepartie offerte. Les administrateurs de la société visée doivent répondre en envoyant aux actionnaires une circulaire du conseil d’administration dans laquelle le conseil formule sa recommandation aux actionnaires d’accepter ou non l’offre ou, si le conseil refuse de faire une recommandation, dans laquelle le conseil fournit une explication portant sur l’absence d’une recommandation. Tant la note d’information relative à l’offre publique d’achat que la circulaire du conseil d’administration doivent être traduites en français si l’offre publique d’achat est faite au Québec (à moins qu’une dispense de minimis ou autre soit obtenue à l’égard de l’exigence de traduction au Québec).

Certaines offres publiques d’achat sont dispensées de ces exigences. C’est le cas notamment : des opérations concernant l’achat de titres détenus par un maximum de cinq actionnaires de la société visée, à condition que le prix payé ne dépasse pas 115 % du prix courant du marché; des achats dans le cours normal des affaires sur un marché boursier dont le total, lorsqu’on l’additionne avec les autres achats effectués pendant une période de 12 mois, ne dépasse pas 5 % des titres en circulation de l’émetteur; de l’acquisition de titres pour lesquels il n’y a aucun marché publié dans le cas d’une société qui n’est pas un émetteur assujetti et qui compte moins de 50 actionnaires, à l’exception des employés actuels ou antérieurs; et des offres publiques d’achat étrangères, entre autres lorsqu’il y a des motifs raisonnables de croire que le nombre d’actions détenues en propriété véritable par des actionnaires canadiens est inférieur à 10 % du total des actions en circulation et que les actionnaires canadiens sont autorisés à y participer selon des modalités au moins aussi favorables que celles qui s’appliquent aux autres actionnaires.

Au Canada, contrairement aux États-Unis, il n’est pas permis de faire une offre publique d’achat conditionnelle à l’obtention de financement. Avant de faire une offre publique d’achat au comptant, l’initiateur doit prendre les « mesures convenables » pour s’assurer que les fonds requis sont disponibles. L’initiateur signe généralement une lettre d’engagement obligatoire avec une banque ou une autre source de financement avant de lancer son offre publique d’achat. Il cherchera à ce que les conditions de disponibilité des fonds stipulées dans la lettre d’engagement de la banque correspondent autant que possible aux conditions présentées dans la note d’information relative à l’offre publique d’achat qui a été envoyée aux actionnaires de la société visée. La loi exige que l’initiateur soit assuré d’obtenir le financement si les conditions de l’offre sont respectées.

En général, si un initiateur acquiert 90 % ou plus des actions avec droit de vote d’une société visée (mis à part les actions que cet initiateur ou les membres de son groupe détenaient avant l’offre) dans le cadre d’une offre publique d’achat adressée à l’ensemble des actionnaires, les lois sur les sociétés prévoient que les actions détenues par des porteurs qui ne les ont pas déposées en réponse à l’offre peuvent être acquises par l’initiateur au prix de l’offre en vertu d’un droit d’acquisition forcée des actions. Si l’initiateur ne peut invoquer ce droit parce qu’il n’a pas atteint le seuil de 90 %, mais qu’au moins 66 ⅔  % des actions en circulation ont été acquises dans le cadre de l’offre, les actions des actionnaires restants qui n’ont pas été déposées en réponse à l’offre peuvent généralement aussi être acquises au prix de l’offre au moyen d’une fusion ou d’un regroupement avec éviction de deuxième étape.

Plans d’arrangement

Les lois fédérales et provinciales sur les sociétés au Canada prévoient en général que les sociétés peuvent faire l’objet d’une acquisition ou d’une fusion et que leurs titres en circulation peuvent être échangés, modifiés ou réorganisés dans le cadre d’un processus supervisé par un tribunal qu’on appelle un plan d’arrangement. Actuellement, les acquisitions de sociétés ouvertes canadiennes sont le plus souvent réalisées au moyen d’un plan d’arrangement.

La société visée dépose une demande ex parte pour obtenir d’un tribunal une ordonnance initiale l’enjoignant d’obtenir l’approbation de ses actionnaires et fixant certaines formalités à cette fin. La société visée prépare et envoie par la poste à ses actionnaires une circulaire d’information de la direction contenant les renseignements prescrits, y compris certains renseignements normalement présentés dans un prospectus concernant l’ (notamment les états financiers pro forma, dans certaines circonstances) si les titres de l’acquéreur sont inclus dans la contrepartie. Contrairement aux notices d’information relatives à une offre publique d’achat et aux circulaires du conseil d’administration, il n’est pas obligatoire de traduire les circulaires d’information de la direction en français, même si une version française est souvent fournie lorsqu’il y a un nombre important d’actionnaires au Québec. Les plans d’arrangement exigent à la fois l’approbation des actionnaires (généralement aux termes d’un vote à une majorité qualifiée d’au moins deux tiers des voix exprimées lors de l’assemblée des actionnaires) et l’approbation finale du tribunal (qui dépend de la conformité à son ordonnance initiale et de sa détermination du caractère équitable de l’arrangement). Un plan d’arrangement offre une flexibilité maximale pour mettre en œuvre divers aspects structurels d’une opération qu’il ne serait pas possible de réaliser dans le cadre d’une offre publique d’achat, et peut être réalisé en une seule étape (au lieu des deux étapes requises par une offre publique d’achat suivie d’une acquisition forcée en vertu d’un droit prévu par la loi ou d’une fusion avec éviction). Un plan d’arrangement peut aussi permettre d’émettre des titres de l’acquéreur aux porteurs américains des actions de la société visée sans que l’inscription de ces titres soit nécessaire aux États-Unis.

Si l’acquéreur est une société inscrite à la cote de la TSX et si celle-ci émet des actions dans le cadre d’une offre publique d’achat ou d’un plan d’arrangement qui entraînerait une dilution pour ses actionnaires de plus de 25 %, l’acquéreur sera tenu, en vertu des règles de la TSX, d’obtenir l’approbation de ses propres actionnaires avant de réaliser cette opération.

Opérations entre parties liées

Les lois sur les valeurs mobilières de certaines provinces canadiennes comportent des règles complexes régissant les opérations entre une société ouverte et les parties qui lui sont liées (c.-à-d. des actionnaires importants, des administrateurs et des dirigeants) et qui atteignent un certain seuil — souvent appelées « opérations donnant lieu à d’importants conflits d’intérêts ». Ces règles sont conçues pour empêcher les parties liées de recevoir un avantage d’une société ouverte au détriment de ses actionnaires minoritaires sans leur approbation et pour uniformiser les règles du jeu en ce qui concerne tout avantage que ces parties liées pourraient avoir (ou pourraient sembler détenir) sur le plan de l’information. Ces opérations sont généralement soumises à un « examen en temps réel » par l’organisme de réglementation des valeurs mobilières compétent et, lorsque des lacunes sont constatées dans le processus associé à une opération ou dans l’information connexe, les organismes de réglementation disposent de pouvoirs réparateurs étendus et pourront exiger une meilleure information ou d’autres modifications concernant l’opération afin d’assurer la protection des détenteurs de titres minoritaires.

Une offre publique d’achat faite par une partie liée à la société visée (c’est-à-dire une « offre publique faite par un initié ») sera soumise à ces règles spéciales, à l’instar des autres structures d’opération aboutissant à un « regroupement d’entreprises » avec une partie liée. En particulier, ces opérations nécessitent généralement un processus d’examen et d’approbation approfondi de la part du conseil d’administration de la société visée, des renseignements plus détaillés concernant le contexte menant à l’opération et, dans de nombreux cas, une évaluation formelle des actions de la société visée par un évaluateur indépendant sous la supervision d’un comité indépendant du conseil d’administration de la société visée.

Si l’acquéreur dans un plan d’arrangement est lié à la société visée ou si une partie liée reçoit un « avantage accessoire », ces règles particulières s’appliqueront aussi de façon générale. L’opération nécessite notamment le consentement d’une majorité des actionnaires minoritaires (des actionnaires sans lien avec l’acquéreur ou toute partie liée qui reçoit un avantage accessoire), en plus de l’approbation des actionnaires requise aux termes des lois applicables en matière de droit des sociétés. Lorsqu’une partie liée fait l’acquisition de la société visée ou est partie à une « opération rattachée » concurrente qui atteint un certain seuil, une évaluation officielle des actions de la société visée par un évaluateur indépendant, sous la supervision du conseil d’administration de la société visée ou d’un comité d’administrateurs indépendant, peut être exigée.

Dans tous les cas, les organismes de réglementation des valeurs mobilières au Canada ont le pouvoir d’intervenir pour mettre fin à une offre publique d’achat ou à une autre opération si elle est abusive pour les actionnaires de la société visée ou pour les marchés financiers, même si elle est conforme aux lois en vigueur. Ils disposent également de larges pouvoirs d’intervention pour empêcher les conseils d’administration des sociétés visées de prendre des « mesures défensives » inappropriées visant à faire échouer une opération.

Déclaration sur la propriété effective / prise de participation

Les actionnaires sont généralement tenus d’informer publiquement le marché, conformément aux exigences du « système d’alerte », lorsqu’ils acquièrent la propriété effective, la supervision ou le contrôle d’actions ou de titres avec droit de vote représentant 10 % ou plus (5 % lorsqu’une offre publique d’achat a déjà été lancée) d’une catégorie de titres d’une société cotée visée (y compris les actions détenues en propriété effective ou contrôlées par l’actionnaire et ses alliés). L’investisseur doit signifier cet avis au marché en publiant un communiqué de presse au plus tard à l’ouverture du marché le jour ouvrable suivant et en déposant, dans les deux jours ouvrables suivants, une déclaration selon le système d’alerte dans la forme prescrite (laquelle doit indiquer l’objectif de l’opération, notamment tout projet ou toute intention de l’investisseur concernant certaines opérations stratégiques sur le capital énumérées ou pouvant donner lieu à de telles opérations, à l’égard de la société visée). Il y a également une période d’attente qui interdit tout achat supplémentaire jusqu’à l’expiration d’un jour ouvrable après le dépôt de la déclaration, sauf si l’acquéreur possède ou contrôle déjà plus de 20 % des titres en circulation de cette catégorie. Un autre communiqué de presse doit être publié et une déclaration additionnelle déposée si un changement touche un fait important contenu dans une déclaration précédente, s’il y a augmentation ou diminution de la propriété ou du contrôle de 2 % ou plus de la catégorie de valeurs mobilières ou s’il y a diminution de la propriété ou du contrôle pour passer à moins de 10 % de la catégorie de valeurs mobilières. Il existe une exception à l’obligation de publier immédiatement un communiqué de presse et une déclaration selon le système d’alerte (ainsi qu’un moratoire sur la négociation) pour les actionnaires autorisés à utiliser le « régime de déclaration mensuelle »; dans ce cas, un « investisseur institutionnel admissible » (c’est-à-dire généralement des institutions financières, des fonds communs de placement, des caisses de retraite, des fonds spéculatifs et certains autres fonds d’investissement) peut faire une déclaration dans les dix jours suivant la fin du mois au cours duquel il dépasse le seuil d’actionnariat de 10 %, à condition qu’il n’ait pas l’intention de faire une offre publique d’achat ou de réaliser une autre opération de prise de contrôle, ni de solliciter des procurations.

Activisme des actionnaires

L’engagement et l’activisme des actionnaires restent très répandus au Canada, même si la tendance est à la négociation en coulisses entre les actionnaires et les conseils d’administration plutôt qu’aux courses aux procurations formelles. L’activisme se manifeste sous diverses formes, notamment par des investisseurs qui soumettent des propositions d’actionnaires ou demandent la tenue d’une assemblée des actionnaires de la société visée, par des votes consultatifs à la majorité sur la rémunération et l’élection des administrateurs, ainsi que par des engagements privés avec les conseils d’administration de la société visée ou par des sollicitations de procurations ou des courses aux procurations en bonne et due forme. Il est souvent suggéré que les lois canadiennes en matière de droit des sociétés et des valeurs mobilières sont plus favorables aux investisseurs que, par exemple, celles des États-Unis, ce qui rend l’activisme potentiellement plus facile à mettre en œuvre au Canada, bien que nombre de ces outils soient soumis à des règles établies et à des mesures de protection qui en empêchent l’utilisation abusive. Aujourd’hui, au Canada comme ailleurs, les conseils d’administration sont de plus en plus conscients de l’activisme des actionnaires et de plus en plus réceptifs à l’idée de s’engager avec les principales parties prenantes pour éviter de manière proactive toute contestation de la part du public. Par exemple, certains conseils d’administration ont trouvé qu’il était avantageux de consulter les activistes, d’une manière confidentielle, lors des discussions sur la stratégie du conseil, afin qu’ils puissent exprimer leurs opinions ou leurs préoccupations plutôt que de se trouver confrontés à des contestations publiques ultérieures. L’activisme des actionnaires est également une caractéristique fréquente dans toutes les formes d’opérations de fusion et d’acquisition, ce qui oblige les acquéreurs et les entités visées à se préparer à un activisme éventuel dans le cadre de toute opération d’acquisition ou de cession potentielle.

Capital-investissement

Les fonds de capital-investissement participent activement aux opérations de financement d’entreprise et de fusion et acquisition au Canada. Nous abordons ici brièvement quelques questions de droit propres à ces fonds.

Un fonds de capital-investissement qui souhaite placer ses titres auprès d’investisseurs au Canada doit préalablement préparer et déposer un prospectus conformément aux exigences de la réglementation canadienne sur les valeurs mobilières ou placer ses titres aux termes d’une dispense de prospectus, comme la dispense d’émetteur fermé. La dispense d’émetteur fermé peut être accordée pour le placement de titres d’un émetteur fermé auprès de personnes faisant partie d’une catégorie prescrite qui acquièrent les titres pour leur propre compte. En s’appuyant sur cette dispense, un émetteur fermé peut mobiliser le montant de capital voulu, au moyen d’un nombre illimité de financements, sans obligation de prospectus.

POUR CONSTITUER ET FAIRE FONCTIONNER UN FONDS DE CAPITAL-INVESTISSEMENT AU CANADA, IL FAUT VEILLER AU RESPECT DES OBLIGATIONS D’INSCRIPTION POUR LES COURTIERS, LES CONSEILLERS ET LES GESTIONNAIRES DE FONDS D’INVESTISSEMENT.

Pour constituer et faire fonctionner un fonds de capital-investissement au Canada, il faut veiller au respect des obligations d’inscription pour les courtiers, les conseillers et les gestionnaires de fonds d’investissement. Une personne physique doit s’inscrire à titre de courtier conformément à la législation canadienne sur les valeurs mobilières si elle exerce, ou indique qu’elle exerce, des activités d’opérations sur valeurs. Une personne physique doit s’inscrire à titre de conseiller si elle fournit, ou indique qu’elle fournit, des conseils à des tiers en matière de placement dans les valeurs mobilières ou d’achat ou de vente de valeurs mobilières. Une personne physique doit s’inscrire à titre de gestionnaire de fonds d’investissement si elle agit à titre de gestionnaire d’un fonds d’investissement. Selon les activités qu’il mène, un fonds de capital-investissement peut être structuré de manière à être dispensé des obligations d’inscription pour les courtiers, les conseillers et les gestionnaires de fonds d’investissement.

Les investissements de capitaux privés au Canada sont similaires aux fusions et acquisitions traditionnelles. Lors de l’acquisition de sociétés ouvertes, il y a lieu d’appliquer l’analyse juridique présentée plus haut pour les offres publiques d’achat et les plans d’arrangement. Comme la plupart des investissements par les investisseurs de capitaux privés recourent à l’effet de levier, il faut porter une attention particulière au financement de l’acquisition (notamment restreindre ou supprimer les conditions de financement complémentaires à la convention d’achat principale). Voir la section Prêts bancaires et autre capital d’emprunt.

Les fonds de capital-investissement peuvent acquérir des participations majoritaires ou minoritaires; dès lors, les conventions régissant les droits des actionnaires ou des investisseurs (ou les ententes d’exploitation similaires, comme les contrats de société) sont de plus en plus importantes pour encadrer la gouvernance, le contrôle, les apports en capital, les opérations de placement et les droits ou restrictions de liquidité (comme les , droits d’entraînement, droits de premier refus, droits de préemption et restrictions sur la propriété). Comme indiqué ci-dessus, les lois sur les valeurs mobilières en vigueur peuvent également exiger la déclaration publique des participations majoritaires ou minoritaires acquises.

Comme les investissements de capitaux privés sont assortis d’un délai préétabli, la structure fiscale est très importante pour les optimiser, notamment lorsqu’il s’agit d’investissements transfrontaliers par des fonds de capital-investissement américains. Comme aux États-Unis, de nombreuses stratégies de sortie peuvent être utilisées par les fonds de capital-investissement au Canada. Les stratégies de sortie habituellement utilisées au Canada sont une vente i) à l’équipe de direction actuelle au moyen d’un rachat par les cadres, ii) à d’autres actionnaires au moyen des droits de transfert des actions ou parts prévus dans la convention entre actionnaires ou le contrat de société, iii) à un tiers au moyen d’une vente aux enchères contrôlée ou par vente privée, ou iv) au public au moyen d’un PAPE.

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Par Jennifer F. Longhurst et Jeremy Pleasant

 


 

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